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Montréal, le 10 mars 2016

 

Mme Filomena Rotiroti

Présidente

Commission de la culture et de l’éducation de l’Assemblée nationale du Québec

Édifice Pamphile-Le May

1035, rue des Parlementaires, 3e étage, bureau 3.15

Québec (Québec) G1A 1A3

 

Objet : Réaction de la Fédération des cégeps au mémoire sur le projet de loi nº 86 déposé par la Fédération des chambres de commerce du Québec

 

Madame la Présidente,

Comme vous l’avez sans doute noté, la Fédération des cégeps s’est abstenue de participer aux débats entourant le projet de loi nº 86, qui fait l’objet d’auditions de la Commission que vous présidez. Or, la présentation de la Fédération des chambres de commerce du Québec (FCCQ) dans le cadre de ces auditions, nous a forcés à intervenir publiquement, le 8 mars dernier. Il nous apparaît maintenant important de vous communiquer la teneur de cette réaction et les raisons qui l’ont motivée, et nous vous serions reconnaissants de bien vouloir en informer l’ensemble des membres de la Commission.

Dans le mémoire intitulé La formation professionnelle et technique à l’heure des changements à la gouvernance des commissions scolaires, qu’elle vous a présenté le 8 mars, la FCCQ propose essentiellement de confier l’éducation à des conseils régionaux composés majoritairement d’entreprises, qui remplaceraient les conseils d’administration des cégeps formés de membres internes et externes, dont certains sont désignés par le ou la ministre responsable du réseau collégial public. Jugeant cette proposition dangereuse, la Fédération des cégeps s’y oppose vivement. L’éducation ne peut se résumer à la seule adéquation formation-emploi et confier notre système d’éducation aux entreprises sans autre souci que de fournir la main-d’œuvre au marché du travail nous apparaît insensé, voire irresponsable.

Les cégeps sont très actifs en matière d’adéquation formation-emploi et tout à fait disposés à accroître leurs efforts en ce sens. Ils attendent cependant des entreprises qu’elles assument leur part de responsabilité en ne se contentant pas de déplorer le manque de main-d’œuvre disponible et d’en imputer la cause unique à un problème de gouvernance, comme le fait la Fédération des chambres de commerce du Québec. Bien au fait de la situation des entreprises, les cégeps offrent 132 programmes de formation technique conduisant au DEC, des formations élaborées et révisées avec le marché du travail, en plus des quelque 300 programmes courts de formation technique menant à une attestation d’études collégiales (AEC) offerts annuellement aux adultes qui souhaitent se former ou se recycler.

Ces programmes, de même que les autres services que les cégeps ont mis sur pied pour soutenir la compétitivité des acteurs économiques de leur territoire, constituent également une des réponses aux besoins de main-d’œuvre qualifiée des entreprises, et les cégeps s’attendent à ce que ces dernières y aient recours plus largement afin de combler leurs besoins en personnel dans un contexte démographique défavorable.

Malgré ce que laisse entendre la FCCQ, les cégeps contribuent largement à fournir aux entreprises québécoises la main-d’œuvre dont elles ont si crucialement besoin, et rien ne laisse croire que cette contribution s’affaiblira durant les prochaines années. Au cours de la dernière décennie, les 48 cégeps du Québec ont fait en sorte que 600 000 personnes obtiennent un diplôme collégial (DEC ou AEC) et 300 000 de ces personnes ont été diplômées après avoir suivi un programme de formation technique, ce qui leur a potentiellement permis d’intégrer immédiatement le marché du travail.

Par ailleurs, lors de leur passage au cégep, les jeunes acquièrent non seulement des connaissances spécifiques qu’ils mettent en pratique une fois sur le marché du travail, mais également une formation générale, commune à tous, comme le souhaitaient les membres de la commission Parent qui a donné naissance à ce modèle québécois. Cette formation générale permet aux jeunes de se réaliser en tant que citoyen et de contribuer à l’avancement de notre société, de mieux maîtriser leur langue maternelle ainsi qu’une langue seconde, et de développer leur pensée. En gros, elle contribue au développement du savoir-faire et du savoir-être, des habiletés dont la FCCQ déplore l’absence chez certains « diplômés de tous les ordres d’enseignement », en avouant cependant ne pas disposer de « données spécifiques au Québec » à cet égard, alors que le Québec est précisément l’un des seuls endroits au monde à disposer d’un modèle d’enseignement collégial combinant formation générale et formation spécifique!

Plutôt que de nous engager ainsi dans un débat de structure, sur la base d’une analyse simpliste véhiculant un nombre important de préjugés et soulevant plus de questions qu’elle n’apporte de réponses, comme semble vouloir le faire la FCCQ, la Fédération des cégeps propose plutôt de favoriser les rapprochements entre les entreprises et les maisons d’enseignement. Actuellement, 80 % des programmes techniques conduisant à un DEC comportent des stages en milieu de travail et ces stages représentent dans certains cas jusqu’à 65 % de la formation spécifique. La Fédération des cégeps a elle-même mis de l’avant tout récemment, avec des partenaires du monde économique, dont la FCCQ, des projets de partenariats destinés à intensifier les rapprochements entre ses membres et les entreprises. Et cela, même si la FCCQ prétend, dans son mémoire, que le système d’éducation québécois dans sa forme actuelle ne permet pas ce genre de partenariat.

À la lumière de ce qui précède, vous conviendrez, Madame la Présidente, qu’il était de notre devoir de rétablir les faits, et nous vous remercions à l’avance, ainsi que tous les membres de la Commission de la culture et de l’éducation, de nous en avoir donné l’occasion. Selon les dernières données disponibles, le taux de placement moyen des diplômés de la formation technique au cégep est de 93 % et le taux de satisfaction des employeurs à l’égard de leurs compétences se chiffre à 96 %.

À nos yeux, la FCCQ fait fausse route en réclamant des changements de gouvernance des cégeps alors qu’elle devrait plutôt miser davantage sur la collaboration entre ces derniers et ses propres membres, dans l’intérêt socioéconomique du Québec.

Je demeure à la disposition des membres de la Commission pour répondre à leurs questions le cas échéant.

Je vous prie d’agréer, Madame la Présidente, mes salutations distinguées.

 

Le président-directeur général,

 

Bernard Tremblay

 

cc. Mme Hélène David, ministre responsable de l’Enseignement supérieur