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[numRevue]Décembre 2014 • Vol. 10 No 1[/numRevue]

[lienPDF]https://www.fedecegeps.qc.ca/wp-content/uploads/2014/12/Perspectives_collegiales_-decembre-2014.pdf[/lienPDF]

[titre]La recherche au collégial selon… Luc Desautels[/titre]

Les activités de recherche menées dans les collèges sont encore trop souvent méconnues ou victimes de préjugés. Pourtant, la recherche au collégial n’a pas à rougir de celle qui se pratique dans les universités, croit Luc Desautels, professeur de philosophie au Cégep régional de Lanaudière à L’Assomption et tout premier récipiendaire du Prix Acfas — Recherche au collégial. Entretien avec un chercheur qui se passionne autant pour ses sujets de recherche qu’au sujet de la recherche elle-même.

Q. Qu’est-ce que le fait de recevoir le tout premier Prix Acfas Recherche au collégial représente pour vous?

R. C’est une récompense qui est très gratifiante. Je dois dire qu’au regard des critères qui sont liés à ce prix, ce sont non seulement mes activités de recherche qui sont soulignées, mais aussi le fait que j’ai été très engagé dans le réseau de la recherche. J’ai été membre du conseil d’administration de l’Association de la recherche au collégial (ARC) pendant plusieurs années, association que j’ai aussi eu l’honneur de présider. C’est donc mon engagement pour valoriser la recherche collégiale et pour tenter de favoriser son meilleur développement qui est également reconnu avec ce prix. Si je suis rempli de gratitude, donc, je suis loin d’en prendre tout le bénéfice : une grande part de ce prix revient à l’ARC et à l’équipe de recherche à laquelle j’appartiens. Je félicite d’ailleurs cette heureuse initiative de la Fédération des cégeps, en partenariat avec l’Association des collèges privés, et de l’Association francophone pour le savoir (Acfas), car cela donne de la visibilité et de la crédibilité à la recherche au collégial. En ce sens aussi, je suis très honoré d’être le premier récipiendaire de ce prix.

[boite][boiteTitre]Un enseignant et un chercheur d’exception[/boiteTitre]

Détenteur d’une maîtrise en éducation et d’un doctorat en philosophie, Luc Desautels enseigne la philosophie et l’éthique appliquée au Cégep régional de Lanaudière à L’Assomption depuis plus de trente ans. Il a siégé au conseil d’administration de l’Association pour la recherche au collégial (ARC) pendant une dizaine d’années, dont sept à titre de président. Il est l’auteur de nombreuses publications scientifiques ayant, entre autres, pour sujet les enjeux éthiques de sa profession, les technologies de l’information et les facteurs de réussite des étudiants. En mai 2014, il reçoit des mains du ministre de l’Enseignement supérieur, de la Recherche et de la Science le Prix Paul-Gérin-Lajoie pour son excellence en enseignement, tandis qu’à l’occasion du 70e Gala de l’Association francophone pour le savoir, en octobre dernier, il devient le tout premier récipiendaire du Prix Acfas — Recherche au collégial pour ses activités de recherche menées dans le domaine des sciences sociales et humaines. Pour en apprendre davantage sur son parcours de chercheur au collégial, consultez l’article du quotidien Le Devoir publié le 25 octobre dernier.[/boite]

Luc Desautels (Crédit photo : Maryse Boulanger)

Luc Desautels
(Crédit photo : Maryse Boulanger)

Q. Quel regard portez-vous sur l’état actuel de la recherche au collégial?

R. Premièrement, la recherche au collégial est résiliente. Elle est tenace, voyez-vous. Par exemple, quand on lit l’histoire de la recherche collégiale qui a été rédigée par mon collègue Sébastien Picher(1), on s’aperçoit qu’il y a eu des activités de recherche dès les débuts du réseau des cégeps, et qu’il y en a eu de manière constante par la suite. On voit aussi qu’elle a déjà reçu des coups durs, entre autres au milieu des années 1990, quand, dans un souci de rationalisation des budgets — cela sonne familier à nos oreilles, n’est-ce pas? —, tout un pan des mesures de soutien à l’égard de la recherche dans les collèges a littéralement fondu. Néanmoins, la recherche a persévéré, et son sort s’est même passablement amélioré depuis le début des années 2000.

Deuxièmement, la recherche au collégial est tous azimuts. Ce que je veux dire par là, c’est qu’on retrouve des chercheurs des collèges dans tous les domaines de recherche. Les organismes subventionnaires ont l’habitude de diviser les chercheurs en trois grands domaines de recherche (nature et technologies, santé, société et culture), dans chacun desquels s’exerce la recherche au collégial.

Troisièmement, elle est volontaire. C’est encore une autre de ses forces. C’est-à-dire que les enseignants et les enseignantes du collégial ne sont pas obligés de faire de la recherche. Je trouve que c’est une force : quand ils y plongent, ils y plongent parce qu’ils le veulent, parce qu’ils sont passionnés, motivés, et ils accomplissent beaucoup.

D’un autre côté, c’est aussi une faiblesse que d’être volontaires. Nous sommes drôlement placés dans le réseau. Il faut faire connaître notre habileté, notre capacité à faire de la recherche, et les faire valoir auprès des gens de l’externe, auprès des décideurs, des fonds subventionnaires, etc. Et, en même temps, il faut continuellement convaincre les collègues à l’interne de faire de la recherche. Ce sont les raisons pour lesquelles je désigne le caractère volontaire de la recherche collégiale comme à la fois une force et une faiblesse.

Une autre faiblesse, c’est que, à part ce qui se fait dans les centres collégiaux de transfert de technologie (CCTT), la recherche collégiale est encore assez peu connue. Encore là, même les CCTT méritent que leurs travaux de recherche soient davantage connus et reconnus. Mais que dire de ceux qui, comme moi, œuvrent en philosophie ou dans leurs propres disciplines sans être liés à un centre collégial de transfert de technologie?

Q. Mieux se faire connaître, ne s’agit-il pas là du principal défi de la recherche au collégial?

R. Il s’agit en effet d’un défi de taille pour la recherche au collégial : faire connaître davantage et mieux la recherche qui se fait dans le réseau, la faire rayonner au-delà des enceintes des collèges. Mais pour cela, il faut d’abord prendre notre place en surmontant les préjugés.

Car des préjugés, il y en a. Par exemple, au moment de me remettre mon Prix Acfas — Recherche au collégial, l’animateur Yannick Villedieu m’a demandé sur scène si la recherche au collégial n’était pas une recherche à rabais quand on la compare avec les recherches qui sont menées en milieu universitaire. Une question comme celle-là, après tout très innocente, trahit à mon avis un certain préjugé à l’égard de la recherche qui se fait dans les collèges. Or, la seule fois, à ma connaissance, où la recherche collégiale et la recherche universitaire ont été comparées, c’est dans un rapport du Fonds pour la Formation des chercheurs et l’aide à la recherche (FCAR) qui date du milieu des années 1990 dans lequel une étude comparative concluait que les recherches menées au collégial étaient d’aussi grande qualité que celles menées à l’université. Évidemment, il ne faut pas être la grenouille qui veut se comparer au bœuf. Les universités ont des moyens autres que ceux des collèges, sans aucune mesure quant au nombre de chercheurs. Ils ont aussi des mandats plus forts que les nôtres du point de vue de la recherche et davantage de ressources. Nous ne cherchons bien évidemment pas à prendre la place des universités, nous voulons seulement nous voir reconnaître les atouts qui sont les nôtres en matière de recherche.

[boite][boiteTitre]Prix Acfas — Recherche au collégial[/boiteTitre]

Parrainé par la Fédération des cégeps et l’Association des collèges privés du Québec, le nouveau prix pour la recherche au collégial de l’Association francophone pour le savoir (Acfas) veut souligner la qualité des activités de recherche d’une personne du réseau collégial.L’organisme vient d’ailleurs de lancer son appel de candidatures pour l’ensemble des prix qu’elle remettra à son 71e Gala, en octobre 2015, et les personnes intéressées à soumettre la candidature d’un chercheur ou d’une chercheuse de cégep doivent le faire d’ici le 9 février 2015 à 23 h 59. En 2015, le Prix Acfas — Recherche au collégial sera remis pour la première fois à une personne dont les activités sont menées dans le champ des sciences de la nature, sciences médicales, génie et mathématiques. Pour en savoir plus sur le Prix Acfas — Recherche au collégial, consultez la section Prix et concours sur le site de l’Acfas.[/boite]

Q. Et la place de la recherche au collégial, quelle est-elle? À quels besoins répond-elle?

R. D’abord, nous [les chercheurs des collèges] sommes présents sur l’ensemble du territoire québécois et sommes très bien arrimés aux besoins régionaux. La loi reconnaît aux collèges un rôle de contributeur au développement économique, notamment au moyen d’activités de recherche, lesquelles ne sont pas nécessairement juste appliquées. Je n’ai personnellement jamais été partisan de l’approche des Collèges et Instituts du Canada (CIC), qui met l’accent seulement sur le caractère appliqué de la recherche collégiale.

Car le premier besoin auquel répond la recherche, c’est le besoin de connaître. Quelqu’un qui fait œuvre d’éducation, dont le métier est d’enseigner, doit avoir un rapport direct avec la connaissance. C’est ce qu’il essaie de partager avec les autres, et c’est notamment par la recherche qu’on peut faire avancer la connaissance. Moi, quand j’enseigne la philosophie au cégep, mon rôle n’est pas seulement de répéter ce que l’on sait déjà, je veux faire évoluer davantage la connaissance, je veux jeter un peu plus de lumière sur les objets avec lesquels je travaille et sur lesquels je réfléchis avec mes étudiants et mes étudiantes. Donc, d’abord le besoin de connaître, de connaître mieux et de connaître plus. Ensuite, oui, bien sûr, un autre besoin auquel la recherche au collégial répond, c’est celui de l’application de ces connaissances, que ce soit sur le terrain des résolutions de problème ou sur celui de l’amélioration des processus. Mais je dirais qu’un besoin supplémentaire auquel la recherche répond, c’est tout simplement celui de former. Plus les étudiants et les étudiantes, comme les enseignants et enseignantes, seront sensibilisés à la recherche, plus à leur mesure ils y auront goûtée, meilleur sera leur esprit critique et plus ils auront le goût d’aller plus loin eux-mêmes dans l’aventure de la recherche.

Car si nous voulons dépasser les préjugés, si nous voulons construire nos vies à partir des données les plus probantes possible, c’est précisément, je pense, le lot de la recherche.

[boite][boiteTitre]La recherche au collégial se démarque au congrès de l’Acfas[/boiteTitre]

En mai dernier, à l’occasion du 82e congrès de l’Acfas, cinq colloques ont été organisés spécifiquement par des chercheurs et des chercheuses du réseau collégial public, en plus des nombreuses communications libres issues de la recherche au collégial qui ont ponctué les cinq jours de ce prestigieux congrès scientifique. Parmi les colloques « collégiaux » présentés, deux ont particulièrement retenu l’attention des congressistes de même que des médias qui ont couvert l’événement, soit le colloque L’innovation dans l’industrie du vêtement : perspectives d’avenir organisé par le centre collégial de transfert en technologie de l’habillement Vestechpro affilié au Cégep Marie-Victorin ainsi que le colloque La culture de la recherche collégiale organisé par l’Association pour la recherche au collégial (ARC). Le 83e congrès de l’Acfas, qui accueillera lui aussi sa part de chercheurs et de chercheuses issus du réseau collégial, se déroulera du 25 au 29 mai 2015 à l’Université du Québec à Rimouski (UQAR) ainsi qu’au Cégep de Rimouski.[/boite]

[reference]1. Sébastien Picher, La recherche collégiale : 40 ans de passion scientifique, PUL, 2011.[/reference]