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Texte publié dans Le Devoir, le 2 novembre 2000.

Par Gaëtan Boucher, président-directeur général de la Fédération des cégeps

Amener plus de jeunes à obtenir leur diplôme, c’est un défi et une priorité pour les réseaux d’éducation. Mais c’est aussi un problème complexe, qui demande des solutions complexes, adaptées à chaque situation. Voilà pourquoi les collèges ont opté pour une approche sur mesure, collège par collège, programme par programme, région par région. Faire augmenter la diplomation, cela suppose, en outre, une mobilisation générale de tous les gens concernés pour infléchir les réalités préjudiciables à l’obtention du diplôme, et une prise en charge du problème et de ses solutions par le milieu. Actions qui relèvent principalement de la responsabilité des collèges et de leur conseil d’administration, comme j’ai déjà eu l’occasion, d’ailleurs, de l’exprimer au ministre de l’Éducation.

Par ailleurs, même s’il faut viser des objectifs élevés, la situation de chaque collège et de chaque programme à l’intérieur d’un même collège est différente, et les facteurs qui influencent les taux de réussite, variés d’un établissement à l’autre. Dans ces conditions, on ne peut fixer des objectifs uniformes pour tous. Il faut, au contraire, que chaque collège puisse déterminer lui-même ses propres objectifs, ambitieux certes, mais établis à partir de sa propre réalité. Car ce qui peut être facile à atteindre pour l’un peut ne pas l’être du tout pour un autre. C’est la seule façon de faire évoluer les choses.

Un problème complexe

Tout d’abord, il faut bien distinguer la diplomation de la réussite. Au collège, on réussit très bien : le taux de réussite aux cours est de plus de 85 %, en augmentation constante depuis 1997. Mais bien qu’ils réussissent leurs cours, trop de jeunes quittent le collège avant d’avoir obtenu leur diplôme. C’est là que réside le problème et qu’interviennent une multitude de facteurs, externes aux collèges, qui influencent la diplomation.

Deux facteurs jouent un rôle particulièrement important : d’une part la moyenne au secondaire — plus cette moyenne est élevée, plus les taux de diplomation sont hauts — et d’autre part le pourcentage de filles et de garçons dans les programmes — les filles réussissent mieux que les garçons. Dans certains pays où l’on sélectionne très sévèrement les étudiants en provenance du secondaire, notamment dans plusieurs collèges américains, les taux de diplomation sont élevés. Ils le sont également au Québec, pour les étudiants qui ont une moyenne forte au secondaire, ou dans les programmes où ces étudiants sont majoritaires. C’est le cas, notamment, du programme Sciences, lettres et arts, dont le taux de diplomation est de 90 %. Mais si on limitait l’accessibilité des collèges aux étudiants les plus forts, on fermerait la porte de l’enseignement supérieur à tous les autres jeunes capables aussi d’y réussir, les privant ainsi d’un avenir prometteur.

D’autres facteurs ont aussi une influence décisive sur la diplomation, et constituent un obstacle à l’obtention du diplôme. L’attrait du marché du travail en est un, et beaucoup trop d’étudiants, particulièrement dans les secteurs en pénurie de main-d’œuvre, sont engagés par les entreprises avant même d’avoir leur diplôme. Les trop nombreux changements d’orientation en sont un autre : les étudiants qui changent plusieurs fois de programme obtiennent leur diplôme en moins grand nombre. Et on ne peut passer sous silence la variable socioéconomique : 25 % des étudiants dont les parents n’ont pas terminé leurs études secondaires abandonnent leurs études collégiales, au Québec comme au Canada 1. Chaque établissement doit peser chacun de ces facteurs pour choisir les mesures les plus appropriées à sa situation.

Des solutions complexes

Augmenter la diplomation, c’est transformer la réalité en profondeur. Pour y arriver, il faut que le milieu se prenne en main. Au premier chef, le personnel des collèges — les enseignants principalement, qui sont des acteurs essentiels de la réussite des étudiants —, doivent se mobiliser de plus en plus autour de l’objectif commun. Ensuite, l’ensemble de la communauté locale doit s’investir pour faire changer les mentalités et reconnaître l’importance du diplôme. Les étudiants — premiers artisans de leur réussite — et leurs parents doivent faire du diplôme une priorité, ce qui n’est pas le cas actuellement : la moitié seulement de la population québécoise juge que les études supérieures sont importantes pour obtenir un bon emploi. Quant aux nouveaux inscrits au collège, pour 40 % d’entre eux, l’obtention du diplôme n’est pas ce qu’ils privilégient quand ils entreprennent leurs études2. Et il faut aussi que les entreprises elles-mêmes, avec les collèges, favorisent l’obtention du diplôme. Tout cela demande un travail considérable, de tout le monde, sur le terrain.

Enfin, il faut être bien conscient que les taux de diplomation ne suffisent pas à eux seuls à exprimer la qualité de la formation. Les collèges demandent que d’autres indicateurs soient aussi utilisés, comme c’est le cas ailleurs et notamment en Ontario et en France. Les taux de placement, la satisfaction des employeurs, la satisfaction des diplômés et les taux de réussite aux cours durant la première année d’université permettent de mesurer plus justement la performance globale des établissements.

Témoigner publiquement de la réussite

Les collèges assument leurs responsabilités en ce qui concerne la diplomation et ils ont commencé à le faire bien avant le Sommet du Québec et de la jeunesse : ils ont été les premiers, en juin 1999, à proposer des plans de réussite pour faire augmenter les taux de diplomation. Ils sont en train de faire adopter leur plan par leur conseil d’administration et ils témoigneront publiquement de ce qu’ils vont faire pour que plus de jeunes obtiennent leur diplôme. Qui mieux qu’eux-mêmes, avec leur conseil d’administration, avec leur milieu, avec leur communauté, pour remporter cette bataille d’un nouveau genre?


1Statistique Canada, Revue trimestrielle de l’éducation, 2000
2SRAM, Aide-nous à te connaître, août 2000.